La police l’escorte jusque dans la pharmacie. Elle est complètement sous le choc. Elle est tremblante, frileuse sous 26°.

L’un des agents avec elle m’explique que suite à une dispute avec son copain, la jeune dame avait reçu un coup au visage. Oui je la vois cette entaille sous l’œil droit, et cet hématome qui commence à bleuir. Il me demande si je peux lui prodiguer quelques soins d’urgence.

« Oui bien sûr ! »

Je désinfecte l’entaille, j’applique de quoi réduire un peu l’hématome. Un petit pansement et on masque un peu tout ça. Elle reste assise un moment le temps de reprendre un peu son calme.

Une fois que j’ai terminé, et après un merci Madame, elle ressort de la pharmacie. Je constate qu’elle regarde autour d’elle un peu paniquée. Je croyais qu’elle cherchait son chemin. Mais non. En fait, elle le cherchait, lui. Celui qui venait de lui asséner ce coup au visage.

Les agent présents lui disent qu’il est assis de l’autre côté de la rue. Elle traverse rapidement, elle a l’air rassuré, et elle se jette amoureusement dans ses bras.

Je regarde la scène de l’intérieur de la pharmacie, en présence des agents de police qui l’ont amenée. Et je les observe. Ils s’enlacent. Il la couvre de baisers. Elle est agrippée à son cou. Elle ne compte pas le lâcher.

Les policiers m’expliquent, visiblement dépassés par les événements, qu’elle avait rejeté leur conseil de porter plainte. Ils ne peuvent pas l’y contraindre ! Elle avait dit à l’un des policiers que c’était la première fois que son copain levait la main sur elle. Mais avait affirmé le contraire à un autre. Pourquoi ?

J’espère simplement ne pas la revoir pour le même type d’incident. Mais ce n’est probablement qu’un vœu pieux. Car je sais malheureusement, un peu par expérience et beaucoup par un constat général, que le 1er coup est bien souvent le début d’une longue série.

Que faire dans ce cas si ce n’est d’essayer de sensibiliser la personne ? Tenter de lui ouvrir les yeux pour qu’elle regarde en face et avec courage la violence de ce qu’elle venait de vivre ?

J’entends déjà certaines personnes dire « mais si elle est toujours avec lui c’est qu’elle accepte cette situation !« . À ceux-là, je veux simplement rappeler de ne jamais sous-estimer l’emprise psychologique qu’une personne peut avoir sur une autre, avec tout ce qu’elle traîne dans son cortège d’émotions comme la peur du rejet, de la solitude, le sentiment de n’avoir aucune valeur sans l’autre, etc.

En tout cas nous sommes là. Elle saura où nous trouver si besoin. C’est je pense le moins que nous pouvons faire.

Isabelle Moumié

J'écris pour respirer. Je souhaite que ces mots fassent du bien à celles qui les lisent, et libèrent celles qui en ont besoin.

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